Dans l’œil d’Hugo Greiner : Amphore attribuée à Charles Bozonnet

Entre fascination et fantasme, les grandes civilisations antiques furent au XIXème siècle, source d’inspiration pour les artistes et artisans. En 1810, le florentin Giuseppe Micali publie un ouvrage sur les étrusques. S’en est suivi la découverte entre 1827 et 1833 d’inhumations en Toscane qui contribuèrent à un engouement nouveau pour cette culture. Les arts décoratifs de cette époque sont marqués des grandes redécouvertes des mondes anciens. Hugo Greiner nous présente une amphore en terre cuite, attribuée à Charles Bozonnet et parfait exemple de ces influences antiques…
 

Cette amphore date des années 1830-1840, années correspondant à la redécouverte de la civilisation étrusque, qui passionnera les créateurs de cette époque et donnera lieu à une véritable mode.
 

Cette œuvre a été réalisée par Charles Bozonnet, potier originaire de Bourg en Bresse. Grand admirateur des écrits d’Alexandre Dumas, il fut pour cette pièce, fortement inspiré par Ascanio, un roman publié en 1842, traitant de sujets antiques.  Fait particulièrement marquant, Charles Bozonnet est cité dans « Causerie », nouvelle autobiographique de 1857 d’Alexandre Dumas, qui mentionne une rencontre entre l’écrivain et le potier. Dans cet écrit, Alexandre Dumas fait état d’une commande de trois amphores à Charles Bozonnet, dont la description est extrêmement proche de la pièce présentée ici. Bien que l’on ne puisse pas l’affirmer, il pourrait être probable que cette œuvre soit issue de cette fameuse commande.
 

Etudions le décor de manière plus précise... Reprenant la forme typique des amphores étrusques, cette pièce est le fruit d’un mélange d’influences des grandes civilisations antiques. Les représentations incisées sur la terre cuite peuvent rappeler la culture hellénistique et la culture de Minos, bien que le langage graphique soit davantage tiré de l’Egypte ancienne.
 

Le pourtour supérieur, stylisé et cannelé, est particulièrement influencé des décors gréco-latins. Les petites têtes apparaissant sur les anses sont quant à elles très grecques et étrusques.
 

Sur la panse de l’amphore, on retrouve presque un bestiaire, mais avec des animaux toujours liés à l’être humain, comme ce crocodile portant un homme sur son dos. L’influence égyptienne est forte, notamment lorsque l’on observe les scènes d’esclavage représentées dans ce décor. Dans ces ornements, Charles Bozonnet n’a pas l’intention d’être précis, les proportions, les formes et les détails sont volontairement réalisés de manière naïve. Ce qui est intéressant, c’est la profusion d’idées. Quand on regarde ces scènes, on peut y voir quelque chose touchant au mystique.
 

Ce décor est une interprétation que l’on pouvait avoir, à cette époque, des pièces anciennes antérieures à la période classique. Cette amphore est un véritable document sur le regard qui était alors posé sur l’archéologie.
 

Totalement dans le style de la Villa Kerylos, cette amphore possède une valeur décorative forte, mais au-delà de cet aspect, l’histoire qui est derrière en fait un objet de collection d’envergure.

 

 

 

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