Emmanuel Roucher, la vie en peinture

Si chaque tableau était un petit monde, le stand d’Emmanuel Roucher serait un univers… Son univers, riche de surprises et puits de potentielles découvertes. Alors venez gouter au plaisir de la peinture et du dessin, approchez-vous, prenez le temps de regarder et d’écouter ce marchand enthousiaste vous raconter ses coups de cœurs qui deviendront à coup sûr, objets de désir puis de passion.

Quel est votre parcours ?

J’ai débuté par des études en histoire de l’art dans le but d’être commissaire-priseur. Mais dès mon premier jour de stage, j’ai compris que ce n’était pas pour moi. C’est à la suite de plusieurs rencontres que je me suis retrouvé à chercher un stand aux Puces. En 1999, je me suis installé avec deux associés, dans le stand que j’occupe toujours actuellement. Je travaille seul depuis 2006.

Parlez-nous de votre spécialité

Je me suis spécialisé dans la peinture et le dessin ancien. Ma sélection est très éclectique, je présente des pièces allant du XVIème jusqu’au début du XXème siècle, ce qui laisse un très large choix. Je pense qu’il n’y a pas une période mieux qu’une autre et c’est pour cette raison que bien souvent, je ne peux m’empêcher d’acheter des œuvres, même quand il ne faudrait pas !

Vers quelle période se porte votre goût personnel ?

J’aime particulièrement le XIXème siècle qui est une époque charnière, tellement riche et éclectique. C’est une période charnière, empreinte de classicisme et qui pourtant, invente continuellement. En France, nous avons la chance d’avoir un très grand nombre d’artistes, certains connus d’autres beaucoup moins, avec lesquels on peut encore s’amuser. Il est possible de se faire plaisir pour très peu d’argent avec les œuvres du XIXème siècle.

Dans une œuvre, qu’est-ce qui vous fait chavirer ?

Il ne faut surtout pas acheter par rapport à un nom… Acquérir une œuvre fait avant tout appel à une sensation, c’est d’ailleurs pour cela que j’achète énormément d’anonymes. Si l’œuvre me touche, je peux être sûr qu’elle touchera quelqu’un d’autre. C’est d’ailleurs toujours le conseil que je donne à mes clients, il faut qu’ils se fassent confiance.

Comment percevez-vous votre métier ?

Je ne vends pas quelque chose d’utilitaire comme du mobilier. Quand on présente des œuvres graphiques, on vend une histoire, un sentiment, de l’amour tout simplement ! C’est en ce sens que je trouve que c’est quelque chose d’extrêmement utile.

C’est un métier extraordinaire dans lequel on apprend tous les jours. C’est pour cela que les marchands sont increvables ! Si l’on apprend tous les jours on est sûrs de ne pas s’ennuyer. Pour cela, il faut se promener dans les allées du marché, même si l’on n’achète pas. Pour ma part, chaque fois que je flâne, je ne peux pas m’empêcher d’acheter quelque chose, je suis un acheteur compulsif, c’est une maladie !

Si le fait de vendre est bien sûr agréable, cela ne sert pas, à mon sens, à accumuler de l’argent sur son compte, mais à pouvoir racheter. Il faut nourrir sa passion, sinon tout cela n’a aucun sens.

Que représente Paul Bert Serpette pour vous ?

Je suis un fan absolu de ce marché et c’est pour cela que j’ai voulu m’y installer. Quand avec mes associés nous avons cherché un espace, nous ne voulions être qu’à Paul Bert Serpette. C’est le meilleur marché des Puces, pour la qualité des marchands et pour son histoire. C’est toujours un bonheur de chiner dans les allées. La diversité des marchands y est incroyable. Il n’y a pas d’endroits aussi mélangés et mixte. Il n’y a pas de classes sociales, tout le monde se mélange de manière hallucinante.

Les Puces ont un charme incomparable, c’est pour cela que je ne quitterai jamais cet endroit. Nous avons beaucoup de chance d’être à Paul Bert Serpette.

Parlez-nous d’une de vos œuvres qui vous tient à cœur

J’aime beaucoup ce dessin de Léon Cogniet, qui est un très bel artiste d’Orléans. C’est un crayon qui date de 1820-1830, années marquées par le début du néoclassicisme, mais aussi du romantisme. Il représente Othello et Desdémone, un sujet que j’adore.

Léon Cogniet n’est absolument pas connu du grand public parce qu’il était riche et n’avait pas du tout besoin de vendre ses œuvres. Toute sa collection a été vendue par sa veuve au musée d’Orléans, il faut d’ailleurs aller voir les salles qui lui sont consacrées pour comprendre quel artiste majeur, il était.

Léon Coigniet avait vu les œuvres de Géricault, empreintes de romantisme exalté, mais est également encore marqué par le classicisme d’Ingres. Toute cette synthèse est visible dans ce dessin ; Othello est en train de se demander s’il va tuer Desdémone qui est d’une tranquillité absolue. Innocente, elle dort de façon ingresque. Othello lui, est totalement gericalien dans le coup qu’il va donner. C’est pour cela que ce dessin est absolument génial.

 

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